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Bib00neLand
9 mai 2012

La naissance de Charlotte.

ATTENTION : ne pas lire si vous allez accoucher ou avoir une césarienne ou si vous n'avez pas encore eu d'enfants.

 

A chaque fois que je lis les récits d’accouchement, j’ai la gorge nouée d’émotion. Ces rencontres sont si belles, si magiques, pleines d’émotions. Je m’étais dit que moi ça ne valait pas la peine que je l’écrive puisque la naissance de ma puce a été tout sauf belle et magique, que j’ai l’impression, encore un mois après, d’avoir raté cette fameuse rencontre.

Après réflexion, il s’avère que l’écrire pourrait m’aider à digérer et à avancer…

L’arrivée de Charlotte est prévue le lundi 26 mars au matin. C’est une césarienne programmée, pas le choix. J’ai déjà vécu 2 césariennes donc je suis plutôt sereine pour l’accouchement. La nouveauté, cette naissance se déroulera dans le nouvel hôpital couple-enfant et non plus dans la vieille maternité. Je suis surtout stressée pour Clément. Je dois rentrer la veille à l’hosto et j’ai une petite voix en moi qui me dit que je peux y rester, bref des angoisses de maman qui laisse son petit. Je sais qu’il sera bichonné par son papa et sa mamie mais quand même…

Nous sommes le dimanche 25 mars. Il est l’heure de faire un gros câlin à mon grand garçon. J’ai la gorge nouée. Je serre les dents pour ne pas pleurer devant lui. Je lui explique une dernière fois pourquoi je vais à l’hôpital « Ta sœur n’a plus assez de place, demain matin elle sera sortie ». Je sais qu’il est inquiet mais il est courageux et me câline aussi. Je pleure dans l’ascenseur et dans la voiture.

J’arrive à la maternité. On me fait une prise de sang (pour une fois sans trop galérer) et on m’installe dans ma chambre, la 317. On sourit avec mon chéri, le 17 nous sommes du 17 tous les 2. La chambre est belle, neuve, spacieuse, individuelle. J’ai une grande salle de bain, la télé, une jolie vue sur Belledonne. Mon chéri reste avec moi la soirée. Je lui dis de rentrer pour une dernière nuit de sommeil. La sage-femme passe et me propose un relaxant que je refuse. Je ne suis pas stressée, je vais bouquiner et mater la télé. 00h30, je regarde le plafond, impossible de fermer l’œil. J’appelle la SF pour le relaxant. Je m’endors à 0h45. La Sf doit venir me réveiller à 7h.

Le 26 mars, 5h15. Je me réveille. J’ai la boule au ventre. Dans quelques heures on m’ouvre le bide. Voilà à quoi je pense, je ne me dis pas que je vais voir ma fille mais qu’on va m’ouvrir le bide. Je ne veux pas. Je veux partir. Je revis mes 2 césariennes, la naissance de mes 2 garçons, les suites de couches. Bizarrement ça me calme. Je sais à quoi m’attendre. J’ai très bien vécu mes 2 césariennes qui pourtant étaient faites en urgence. Ça ira.

6h30, je prends ma dernière douche à la Bétadine et surtout je me regarde une dernière fois dans le miroir avec mon gros bidou. Je me dis que c’est surement la dernière fois que je sens un petit bébé bouger en moi.

7h, la SF entre pour me réveiller. Elle voit que je suis déjà prête. Elle me dit que le brancardier viendra me chercher dans une demi-heure. Seb arrive. Ouf, ça me fait du bien de le voir. Lui aussi n’a rien dormi.

7h30, on me descend au bloc. Dernier bisou à mon chéri. Le monsieur est super sympa. Il sera papa en juin. On rigole. Il me souhaite bon courage. J’attends un peu dans le couloir et puis je ne sais plus exactement vers quelle heure mais on m’installe sur la table.

On me badigeonne de Bétadine. Pendant ce temps j’observe. 2 anesthésistes, une infirmière, une ou 2 sage femmes, des étudiantes, et un autre brancardier se présentent. Je ne me souviens que de visages masqués. Le bloc est neuf. Ça brille de partout. Et là, je bloque. Il y a des surfaces réfléchissantes de partout. Le pire la grosse lumière au-dessus de moi n’est pas encore allumée et je me vois comme dans un miroir, nue avec mon énorme ventre orange. Je ne me sens pas bien. Il fait froid. Je ne veux pas me voir, j’espère que je ne verrai pas quand ils ouvriront. Je fixe le tensiomètre.

C’est le moment de la rachi. Le moment que je redoute le plus. On me fait assoir. Et là, je vois mon reflet et l’anesthésiste dans la porte avec sa surface miroir. Je n’arrête pas de me dire « ne regarde pas, ne regarde pas ». Mais trop tard, je la vois préparer ses piqures. Je chouine. Une dame me demande ce que j’ai. Je lui dis que j’ai peur de l’anesthésie locale pour la rachi car je sais que ça fait mal. Elle essaie de me rassurer. Elle m’aide à faire le dos rond. Aïe. Re Aïe. J’ai envie de partir. Je chouine silencieusement pendant que l’on me fait la rachi. Elle gratte. Je sens l’aiguille même si ce n’est pas douloureux. Punaise, elle prend son temps ou quoi. Ca y est. Je dois me rallonger. Il y a pleins de monde mais je me sens terriblement seule. Je sais que mon homme est juste à côté, derrière la fameuse porte miroir.

9h, les obstétriciennes arrivent dont ma gynéco. Elle me dit bonjour. C’est la seule fois où je verrai son visage de mon séjour à la mat. Ça discute week end, hauteur de la table. On allume la grosse lampe, on lève le drap. Je ne vois plus rien à part le drap et la machine qui prend les différentes mesures. « Madame, on commence ».

Je le sens, d’un coup, ça chauffe en bas à droite. Putain, ça chauffe vraiment. J’ai mal là. Je commence à pleurer. « Aïe, j’ai mal, je vous dis que j’ai mal ». Je veux me mordre la main mais mes bras sont attachés. Quelqu’un me met un masque à oxygène et me demande de me calmer. Je pleure, j’ai mal j’ai envie de crier. « Je vous dis que j’ai mal ». « Madame, c’est normal de sentir, ce n’est rien ». « C’est ma 3eme césarienne, je sais qu’on sent les choses mais là j’ai mal. » Je pleure, je crois que je pousse un cri. « Madame calmez-vous où je vous fais une anesthésie générale (ma pire crainte, ne pas voir ma puce) ». Je serre les dents. La douleur est moins intense, je crois que je plane un peu avec l’oxygène. Mais j’ai toujours cette brulure intense à droite. Un mois après j’ai l’impression de la sentir encore.

 

9h19, Charlotte est là. Je ne me souviens pas de l’entendre pleurer mais on me la pose contre la joue et on détache un de mes bras pour que je puisse la toucher. Elle est toute joufflue. Elle est toute belle. Je lui fais un bisou et on me l’enlève déjà. Je ne la reverrai pas pendant 4h interminables. On n’a même pas eu le temps de se regarder et cette putain de douleur qui ne me lâche pas. Je pleure. On me dit que tout va bien. Elle va être avec son papa en peau à peau. On me montre une photo d’elle est son papa, pas en peau à peau encore. Le bloc se vide d’un coup. Une urgence, une naissance gémellaire. Il reste une étudiante, l’interne et une autre personne pour la suture. « Madame, on va vous faire des points pas d’agrafes cette fois. » Ok. J’ai droit à un cours de suture pendant presque une heure avec les explications pas à pas de l’interne « là tu piques à 2 cm de la berge et tu sers bien »…J’en ai marre. Je veux sortir de là. Je veux voir ma fille et mon chéri.

10h45 arrivée en salle de réveil ou la salle de l’horreur. Comment peut-on concevoir une maternité comme cela ? C’est une salle commune à la pédiatrie, à la gynéco et à l’obstétrique. Donc interdiction d’avoir bébé avec soi. Ben oui, on ne va pas mettre sous le nez d’une femme qui vient d’avoir une IVG un bébé. C’est un cauchemar. Les lits sont alignés. Pas de rideau sauf pour séparer le côté pédiatrie où 2 petits loulous hurlent et pleurent tout ce qu’ils peuvent. Ça me déchire le cœur de les entendre. Je suis à côté d’une dame qui pleure en silence. Il y a d’autres lits. On vient m’ausculter. Aucune intimité. J’ai mal quand elle m’appuie sur le ventre. Je pleure. En silence moi aussi. On me dit que je devrais remonter dès que je pourrai bouger les jambes vers 11h30 normalement. Toutes les 10 min, on m’ausculte. Mes jambes ne bougent pas. Entre temps une femme hystérique hurle qu’elle veut sortir que c’est ça  3eme IVG, qu’elle a l’habitude, qu’elle veut partir, elle s’assoit sur son lit et regarde tout le monde. Nos regards se croisent. Elle rigole. Je pleure.

A 11h30 mes jambes ne bougent pas. On doit attendre. Je n’arrête pas de me dire que la petite doit avoir faim, qu’on n’a pas eu notre 1ere tétée, notre rencontre. Je pleure. Je veux voir Seb. Je veux qu’il me prenne dans ses bras. Je me sens si seule malgré l’agitation autour de moi. Les 2 loulous qui pleuraient remontent dans leur chambre. Je les vois passer dans leur lit prison (de grands lits à barreaux). Leur maman essayant de les calmer comme elles peuvent. Je les plains.

Toutes les 10 min, je pleure de colère cette fois. Pourquoi ces putains de jambes ne bougent pas.

13h, ça y est mes jambes bougent un peu. « Madame normalement on doit attendre que vous pliez les jambes mais si vous voulez on peut vous montez de suite ». Pas de souci, sortez-moi de là. « Ok la prochaine à monter c’est vous ».

13h30 je suis dans ma chambre. Seb est là. La petite dort dans son berceau. Je la regarde et j’ai le sentiment qu’on a raté qqch. Je la regarde et je ne la reconnais pas. C’est bizarre. Je n’arrive pas à me dire que c’est ma fille. Je demande à Seb si elle a eu faim. Il m’explique ses péripéties à lui, le peau à peau, les changements de salles. Le fait qu’il ait été seul à gérer. Elle a pleuré pendant une heure mais elle a fini par s’endormir. Je pleure. Je suis fier de lui car ça a dû être tout aussi long pour lui.

Dans l’après-midi, elle se réveille. On la met au sein mais ça se passe mal. Elle pleure, s’énerve. Finalement elle se rendort dans les bras de son père. Ils sont si complices déjà. Je suis jalouse mais contente car ils ont eu leur rencontre eux.

En fin d’après midi Clément vient nous voir. Je suis épuisée mais si heureuse de le voir. Il est très impressionnée par la perf (et ma tronche décalquée aussi je pense). Il est content et donne le doudou qu’il a acheté à sa sœur. Lui joue avec le cadeau qu’elle lui a amené.

En fin de journée elle a sa 1ere tétée. Nos regards se croisent. Il n’y a pas l’instant magique, trop de fatigue, trop de douleurs peut être. Je sais que c’est ma fille. Je l’aime déjà tant mais je sais aussi qu’il va falloir du temps. Du temps pour se rencontrer, pour digérer… L’allaitement m’aide beaucoup pour rattraper ses instants volés.

Voilà, je vous épargne mon séjour à la mat qui a été plus que moyen notamment le soir même une SF qui insiste lourdement pour me faire mon anticoagulant (piqûre) dans mon ventre déjà bien meurtri. J’ai dû me fâcher pour qu’elle me la fasse dans la cuisse. Sans oublier le réveil le lendemain à 7h pour une pds à jeun et les 15 personnes au moins (j’ai arrêté de compter à 15) qui ont défilées dans ma chambre le matin alors que je ne voulais que dormir et être avec ma fille. Heureusement que je suis tombée sur quelques personnes humaines dans la semaine sinon j’aurai fait une sérieuse dépression. Merci aussi à mon chéri pour sa présence et son soutien car j’ai beaucoup pleuré alors que j’aurai dû être aux anges (et je ne pense pas qu'il est toujours compris mes pleurs). Charlotte elle aussi m’a beaucoup aidé par ses regards, ses sourires, nos tétées.

Pfiou, ç a fait du bien d'écrire tout ça. Bon le clavier est mouillé de larmes de revivre ces moments là mais il le fallait. J'ai hésité à le partager ou le garder pour moi. Finalement, je le partage. Le lira qui veut. Avec le recul, je me dis que cela ne m'empêche pas aujourd'hui d'adorer ma fille. Notre lien n'en sera que plus fort car comme toutes les épreuves elles nous renforcent.

 

Ma petite Charlotte, je t'aime.

Image hébergée par http://uprapide.com/

 

 

 

 

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Commentaires
B
Merci. Ca fait un bien fou de le poser par écrit et surtout je me rends compte que je ne suis pas seule à avoir vécu cela (malheureusement). Justine, c'est vrai que la césa qui est certes une intervention chirurgicale n'est abordé que sous cet angle bien souvent. Ils oublient souvent qu'il s'agit d'un accouchement, d'une naissance...J'aurai eu l’appendicite ça aurait été le même protocole (bon, ils m'auraient peut être pas collé mon appendice sur la joue pour l’embrasser).<br /> <br /> Audrey je t'avais prévenu...tes mots me touchent et me font presque rougir.<br /> <br /> Linou, j'avoue que j'ai pensé à Batoune qd les 2 petits pleuraient en salle de réveil et qd j'ai vu leurs mamans j'ai pensé à toi...quelle torture cela doit être...<br /> <br /> Anne je ne savais pas qu'Alexis a été hospitalisé.
J
Que d'émotions ... merci d'avoir partagé tout ça , ça me fait du bien aussi ayant vécu à peu près la même histoire , la césarienne est encore trop mal accompagné aujourd'hui ce n'est pas un accouchement comme les autres (j'ai d'ailleurs eu du mal à dire que j'avais "accouché" et pendant longtemps ) .Maintenant vous êtes ensemble profitez profitez profitez :)<br /> <br /> <br /> <br /> gros mimis à tous les 4 <br /> <br /> <br /> <br /> Justine
A
bah oui je pleure, et j'ai envie de te faire un gros câlin aussi :(<br /> <br /> tu as certainement vécu un large panel de toutes mes angoisses je ne peux qu'être touchée et encore une fois si admirative...<br /> <br /> tu es une femme étonnante et belle<br /> <br /> tu le prouve encore <br /> <br /> pour une fois les "félicitations" d'usage prennent tout leur sens<br /> <br /> je ne doute pas un instant de la beauté et de la force du lien que vous allez construire<br /> <br /> plein de bisous<br /> <br /> (très jolie photo de Charlotte ;) )
L
Tres beau recit meme si ca ete tres dur pour toi ( j en ai les larmes aux yeux ) et je compatis pour le resentis lors de la separation avec charlotte car j ai un peu vecu la meme chose lorsqu alexis a ete hospitalise pendant 11 jours.<br /> <br /> Profitez de vos moments a 2 maintenant<br /> <br /> Biz et plein de courage<br /> <br /> Anne
L
Tres beau recit meme si ca ete tres dur pour toi ( j en ai les larmes aux yeux ) et je compatis pour le resentis lors de la separation avec charlotte car j ai un peu vecu la meme chose lorsqu alexis a ete hospitalise pendant 11 jours.<br /> <br /> Profitez de vos moments a 2 maintenant<br /> <br /> Biz et plein de courage<br /> <br /> Anne
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